12 octobre 1786

L’an mil sept cent quatre vingt six le douze octobre, je Pierre Nicolas d’Honnet voyer commis du bureau des finances de la généralité de Metz et Alsace, certifie que faisant ma tournée pour la délivrance des ordonnances dudit bureau et par les plaintes des différents particuliers, m’être transporté au village d’Ollisy pour y faire la visite et reconnoissance de leurs chemins communaux, où étant j’aurois requis le maire de la communauté dudit lieu de m’accompagner à la dite visite et reconnoissance ce qu’ils ont accepté, où étoient les sieurs Pierre Pascal maire, jean Banche échevin et de Thierry François greffier de la dite communauté accompagné de deux habitants dudit lieu nous nous serions transportés sur le chemin qui conduit à Stenay, nous aurions reconnu sur le dit chemin, depuis la sortie du village jusqu’au prez Collin des fondrières remplyent d’eau et de vâse enfoncées d’un pied, en suivant le dit chemin et depuis le dit endroit jusqu’à la fin du bois. Le chemin presque impraticable par l’étroit et borné de chaque coté par des monticules hautes depuis cinq jusqu’à dix pieds et n’ayant que quatre pieds de large et remply de ravins ce qui convient d’abattre les dites monticules, remplir les dits ravins, et fondrières et aborner, le dit chemin ne l’étant pas.

Nous aurions reconnu le chemin qui dudit village à Ennevant (Nepvant) est également trop étroit et rempli d’ornières ce qui convient de remplir les dites ornières de pierres et l’aborner ne l’étant pas.

Nous aurions reconnu que le chemin qui conduit à la Ferté est rempli d’ornières et fondrières, notamment un pont dit Miouly (?) dégradé et remply au dessous de l’arche et le fossé au dessus et au dessous remply, ce qui convient de vuider le dit fossé au dessus et au dessous le dit pont pour faciliter l’écoulement des eaux qui s’y déchargent continuellement rétablir le dit chemin dans toute sa longueur et l'aborner suivant les ordonnances du dit bureau, ne l’étant pas.

Nous aurions reconnu que le chemin qui conduit du dit Ollisy à Carignan est intercepté par les laboureurs aboutissant qui poussent leurs charrues jusque sur le dit chemin n’y connaissant pas de bornes ; en remontant le dit chemin absolument trop étroit et remply d’ornières et ravins qui le rend impraticable ce qui convient de le regarnir de pierraille dans les dites ornières, remplir les ravins, lui donner la largeur voulue par les ordonnances du dit bureau en l’abornant ne l’étant pas.

Nous aurions reconnu que le ruisseau de la fontaine du Trou Pierrard se décharge dans le milieu du dit village et le dégrade ce qui convient de lui faire donner son écoulement dans sa première attitude.

Ayant égard que par notre reconnaissance conjointement avec les maire et gens de la susdite communauté, l’intérieur du dit village étant rempli de ravins, ce qui convient de le réparer et le rendre au moins praticable aux voitures.

Mes opérations étant finies et mes notes prises exactement sur les lieux, j’ai à l’instant dressé le présent procès verbal pour être communiqué à Monsieur le procureur du roy du dit bureau pour servir et valoir ce que de raison.

Fait et clot au dit Ollisy les jours et an susdit en présence des maire et gens de la dite communauté qui ont signé avec nous après lecture faite.

 

Suivent les signatures et cet engagement :

 

Nous soussigné Pierre Pascal maire de la communauté d’Olizy et le sieur Jean Banche échevin de la dite communauté déclarons pour et au nom d’icelle que pour éviter de plus grands frais de la part de Monsieur le procureur du Roy et sous son bon plaisir, nous nous soumettons à faire faire toutes les réparations nécessaires à nos chemins communaux indiqués au présent procès verbal dont nous avons parfaite connoissance et ce pour le premier juillet prochain au bout duquel terme nous en certifirons mon dit sieur le procureur du roy, à peine de tout dépens et frais résultant et de payer les frais faits jusqu’à ce jour.

A Olizy le douze octobre 1786

P Pascal, maire

Source : archives de l’intendance de Metz.


Note

Comme toujours sous l’Ancien Régime, on peut se demander si ces recommandations et ces engagements furent suivis d’effet ...

 

Au plan militaire, des chemins en bon état étaient intéressants pour le déplacement et surtout le ravitaillement des troupes. Olizy est à peine à l’écart des grandes routes stratégiques : Sedan - Montmédy ; Stenay - Montmédy ; Stenay - Sedan ...

 

Rien d’exceptionnel dans cette description : à la même époque, Arthur Young (1740-1820) un voyageur agronome anglais traverse la Lorraine. Aux Islettes, il indique :  a town (or rather collection of dirt and dung) : une ville ou plutôt un amas de boue et de fumier ...


Glossaire

Aborner :
mettre des bornes.
Bureau des finances :
Institution qui avait compétence pour les questions domaniales, fiscales et de voirie. Elle était administrée par des trésoriers généraux. La circonscription soumise au bureau des finances s’appelait une généralité. A la fin de l’Ancien Régime, les bureaux des finances étaient tombés en désuétude. Une raison de ce déclin est à chercher dans les empiètements des intendants placés à la tête de la même circonscription, mais avec des pouvoirs très étendus. Une autre cause est la pratique de la vente d’offices, un expédient financier fréquemment utilisé par l’Etat monarchique qui trouvait des ressources en vendant des charges de « fonctionnaires ». Ces charges conféraient des avantages fiscaux ou honorifiques comme la noblesse, elles étaient très prisées de la bourgeoisie. Mais la multiplication des fonctions était source de lenteur, de désordre et d’une baisse de la qualité du travail. Les bureaux des finances furent particulièrement touchés par cette pratique. D’où la décadence tout au long du 18ième siècle (certaines charges restaient même vacantes). Louis 16 supprime les bureaux en 1788.
NB : des écrivains comme Racine et La Bruyère avaient pu appartenir à cette administration sans y avoir jamais consacré une seconde ! On imagine mal - par exemple - un membre actuel du conseil économique et social qui ne se rendrait jamais au conseil, ne serait-ce qu’une demi-minute par mois pour signer la feuille de présence ...
Chemin qui conduit à Stenay :
l’actuelle route de Martincourt. Pour celui de Nepvant, il s’agit de l’ancien chemin, celui du petit moulin.
Commis :
agent ayant reçu une commission, c'est-à-dire une fonction dont il doit rendre des comptes.
Fondrière :
lieu creux où la terre s’est fondue, ou abîmée, soit par des ravins d’eau, soit par quelque autre accident. Se dit aussi d’un terrain où l’eau croupit faute d’écoulement & où on s’enfonce & l’on s’embourbe.
Généralité :
Les généralités (créées au 14ième siècle) étaient au départ des circonscriptions financières administrées par des généraux des finances, puis les bureaux des finances. Elles finirent par être le ressort des intendants (agents du pouvoir central dont l’importance s’accrût considérablement au 17ième siècle, de Richelieu à Louis 14). Les intendants préfigurent les préfets et sont la marque d’un Etat centralisé. Pour mémoire la généralité de Metz fut créée en 1661. Au 18ième siècle le mot est synonyme d’intendance.
Laboureur :
paysan aisé, propriétaire d’une charrue et des animaux - bœufs ou chevaux - pour la tracter. A l’opposé de l’échelle sociale sont les manouvriers - les plus nombreux - qui n’ont que leurs bras à louer.
Procureur du roi :
magistrat établi dans tous les tribunaux et dans les institutions mixtes administratives et judiciaires comme les bureaux des finances ou les maîtrises des eaux et forêts ... Le procureur du roi était chargé de défendre l’intérêt du roi et du public.
Voyer :
officier commis pour avoir soin des rues et des chemins. Il donnait les alignements et surveillait les empiétements. En général, la charge était exercée par le procureur du roi d’une prévôté.
Vuider :
le dictionnaire de Trévoux (18ième siècle) recommandait d’écrire : « vider »